Éducation nationale ou désinformation nationale ?

Éducation nationale ou désinformation nationale ?

Éducation nationale ou désinformation nationale ?

Par Gilles Granereau

A l’heure où notre société vit des évènements impensables il y a de cela quelques décennies, on ne peut que s’interroger sur cette forme de décivilisation1 qui ne touche plus que les seules banlieues, et s’épanche dans le territoire rural. D’aucuns cherchent à trouver une explication au phénomène, et pointent du doigt l’ubuesque gestion politique de notre pays. Mais plus précisément, c’est l’éducation qui apparaît comme élément déclencheur. Quelle éducation ? Celle que les parents sont censés apporter à leurs enfants ? Ou bien l’éducation nationale2, qui souffrirait plus du manque d’objectifs réalistes, de méthodes censées, de volonté, que de moyens ?

C’est un exemple personnel qui est venu étayer mes questionnements sur les insuffisances de l’éducation nationale, et plus précisément un exercice demandé à mon petit-fils en classe de CM1…

La suite va révéler le contenu d’un questionnaire qu’il m’a paru utile de décortiquer, et pour ce faire je citerai intégralement les textes qui apparaissent dans le document, les commentant au fur et à mesure.

Titre de l’exercice : « Les énergies », chapitre 4 « avantages et inconvénient de toutes ces énergies »

« L’utilisation des énergies fossiles (ou épuisables) comme le charbon, le pétrole ou le gaz, produit beaucoup de pollution dans l’air que l’on respire car la production d’électricité rejette de la vapeur d’eau et du dioxyde de carbone qu’on appelle aussi CO2 ». Cette première partie de la présentation appelle une remarque importante, car la « production d’électricité » ne rejette pas que de la vapeur d’eau et du CO2 ! De plus, associer la pollution avec l’émission de vapeur d’eau (voire de CO2) peut laisser circonspect… Poursuivons …

« Cela provoque des gaz à effet de serre et entraine un réchauffement de la planète, ce qui dérègle le climat de la Terre ». Nous y voilà … Passons sur la trivialité du propos avec « cela provoque des GES » … En effet, il y a peut-être là une confusion sémantique entre les verbes provoquer et produire, le second étant plus adapté au contexte. Concernant les « gaz à effet de serre » (GES), ont été jusque-là été évoqués : la vapeur d’eau - ce qui n’est pas faux puisqu’il s’agit là du principal GES sur la planète, chose qui n’est jamais soulignée - et le CO2 qui reste marginal malgré son augmentation contemporaine de 0,03 à 0,04 %. Mais motus sur les autres GES, qui sont - il est vrai - encore plus minoritaires que le CO2. L’affirmation qui suit (« entraine un réchauffement de la planète ») mérite que l’on s’y attarde, puisqu’il s’agit là d’un sujet qui est loin d’être avéré au plan scientifique. Outre l’absence de démonstration scientifique du lien entre augmentation du CO2 et celle des températures (par « effet de serre »), les constats faits depuis huit années montrent que les températures mondiales n’ont pas augmenté, voire ont baissé, alors que les émissions de CO2 n’ont jamais été aussi élevées3. Et c’est ce réchauffement qui serait censé dérégler le climat ? Comme si le climat (il serait plus judicieux d’écrire « les climats ») avait un « règlement » … Les systèmes climatiques sont tellement complexes qu’un seul facteur, comme la température, ne saurait les « dérégler », et il semblerait que ce soit plutôt l’inverse qui se produit, à savoir que les climats découlent de facteurs atmosphériques, cosmiques, terrestres et marins, conditionnant ainsi les températures. Poursuivons :

« Il est donc important pour tous les pays de réduire leurs émissions de CO2. La solution : faire des économies d’énergie ou utiliser d’autres sources d’énergie. Le pétrole provoque également des marées noires dans l’océan ». Bon, là c’est du lourd ! Tout d’abord on ne reviendra pas sur l’affirmation de la nécessité de réduire les émissions de CO2, ce discours émanant de la doxa politico-religieuse fondée depuis des décennies sur une idéologie sans bases scientifiques solides. Mais affirmer une solution unique au problème supposé ressort là encore d’une allégation totalement propagandesque ! On le sait, les émissions de CO2 vont continuer à progresser jusqu’en 2050 (au mieux), quels que soient les efforts qui seront engagés dans les pays développés, que ce soit en matière « d’économie d’énergie » ou de recours à « d’autres sources d’énergie ». De plus, les mesures imposées en matière de « lutte climatique » sont disproportionnées et évaluées à quelques milliers de milliards par an4, alors qu’elles n’aboutiront pas à une réduction des émissions de CO2 ! La phrase suivante apporte de nouvelles surprises :

« L’utilisation de l’énergie nucléaire fait à partir de l’uranium, produit également des déchets qu’on appelle radioactifs, ce qui est mauvais pour la santé des êtres humains ». Un fois de plus, la phrase demeure triviale et pas digne d’être exposée à des élèves de CM1 : peut-être pourrait-on remplacer « fait à partir » par « issue », cela relèverait quelque peu le niveau de l’écriture française, mais ne changerait guère une fois de plus l’idéologie qui transpire de cette phrase. A-t-on des chiffres alarmants montrant qu’en France les déchets nucléaires ont des effets sur la santé humaine ? Non. Gardons le meilleur (quoique…) pour la fin :

« L’utilisation des énergies renouvelables ne produit pas de déchets, mais les éoliennes prennent beaucoup de place, et les panneaux solaires sont chers pour les particuliers ». Bon, ce concentré cacographique d’affirmations erronées et de trivialité linguistique interroge sur le conditionnement latent de nos enfants qui en résultera… Tout d’abord, « l’utilisation » peut être remplacé par « le recours aux ». Mais la phrase recèle une fois de plus des affirmations fausses et éhontées selon lesquelles les ENRi (énergies renouvelables intermittentes) ne produisent pas de déchets : qu’il s’agisse de la fabrication, du transport, de la mise en place, du fonctionnement, et du recyclage, les ENRi sont certainement moins « propres » que le nucléaire, et en tout cas plus coûteuses5 ! J’ai souri en lisant que les éoliennes « prennent beaucoup de place » alors qu’il s’agit là d’un argument détourné de la réalité qui est beaucoup plus pragmatique : l’éolien détruit les paysages, tue les oiseaux et mammifères (chauves-souris), et plus récemment on s’aperçoit qu’elles auraient une influence sur les climats locaux, sur les vents, et sur la réduction des précipitations6 : c’est cela qu’il serait utile de souligner. Quant aux « panneaux solaires », on s’interroge pour savoir s’il s’agit des photovoltaïques ou des panneaux solaires, ces derniers produisant de l’eau chaude et ayant un cycle écologique beaucoup moins impactant que celui des photovoltaïques. Quoi qu’il en soit, la tournure de phrase stipulant que ces panneaux sont « chers pour les particuliers », marque une fois de plus de la rupture entre le texte censé affirmer les avantages du système « ENRi », et les exemples d’effets négatifs supposés de ce dernier (éoliennes qui prennent beaucoup de place et panneaux chers pour les particuliers) : ils sont ici minorés par l’auteur du texte, alors que la réalité montre une pléthore de problèmes environnementaux, économiques et sociaux attachés à ces ENRi !

Après l’endoctrinement, voici les questions posées :

- « Que provoque l’émission de CO2 et de vapeur d’eau ». J’aurais tendance à répondre que l’effet majeur de ces molécules, c’est la photosynthèse. On a bien compris à la lecture de l’énoncé que la réponse attendue n’est pas celle-ci. Mais pourquoi, pour une fois, la vapeur d’eau est-elle évoquée comme émission sous-entendue de la « pollution » liée à la production d’électricité ? Peut-être a-t-on voulu mettre en exergue les émissions de vapeur d’eau des centrales nucléaires ? Il est vrai que la vapeur d’eau, répétons-le, est le principal GES sur notre planète, mais ses rejets dans l’atmosphère du fait de la production d’électricité demeurent anecdotiques.

- « Pourquoi n’utilise-t-on pas davantage les énergies renouvelables ou inépuisables » ? Une fois de plus, la formulation peut surprendre, les ENRi sont loin d’être « inépuisables » du fait des matières non renouvelables nécessaires à l’élaboration des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques. Cette question appelle par ailleurs une réponse qui n’est pas évoquée dans l’énoncé, et qui requiert des connaissances qui ne sont pas du niveau d’un enfant de CM1 (et apparemment pas du niveau des rédacteurs du texte).

- « Quelle énergie est la plus utilisée en France pour produire de l’électricité ». Même remarque que ci-dessus, espérons que l’enseignant a expliqué que 80 % de l’énergie électrique française est produite par le nucléaire !

La fiche-questionnaire contient en encart un commentaire sur le nucléaire : « Contenu en CO2 et en déchets radioactifs du kilowattheure fourni : la fourniture d’un kWh d’électricité par EDF en 2012 (sic) a induit l’émission de 50 g de dioxyde de carbone (CO2) la génération de déchets radioactifs (vie courte : 9,4 mg/kWh, vie longue : 0,9 mg/kWh » Pas sûr que ces informations soient utiles et retenues par des enfants de cet âge ! On trouve (pour « faire » sérieux ?) une source sous ce pavé, qui renvoie au site internet d’EDF, ce qui laisse entendre que les chiffres ci-dessus reposent sur une certaine vérité ; toutefois, on s’aperçoit qu’ils sont totalement hors contexte, et visent plutôt à décrédibiliser le nucléaire.

Que peut-on tirer comme enseignement (c’est le mot…) de cette analyse critique ?

D’une manière générale, le sujet (les énergies) est traité de façon partielle, et l’enfant ne peut en retenir que :

- le pétrole, ce n’est pas bon,

- le nucléaire, ce n’est pas terrible,

- le CO2 dérègle le climat.

(Pardon, j’ai dérivé dans la trivialité, comme le texte que j’ai critiqué)

L’abord de cette « transmission de connaissances » par l’éducation nationale ressort par conséquent d’une certaine idéologie et non de la vulgarisation scientifique. Si les enseignants s’appliquent désormais à ne plus respecter la vérité scientifique (et/ou la langue française, l’histoire, …), on ne peut s’étonner que nos jeunes soient actifs dans les réseaux sociaux où circulent toutes sortes de désinformations. L’enseignement doit transmettre l’analyse objective, la critique, sinon il devient le fossoyeur de la connaissance.

Le résultat, nous le voyons aujourd’hui, c’est bien ce délitement de la Société, cette décivilisation.

Gilles Granereau, juillet 2023

gmgnreau@club-internet.fr

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6 https://www.economiematin.fr/eoliennes-et-climat-un-remede-pire-que-le-mal

 

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