LES SCIENCES SOCIALES EN VOIE DE DISPARITION

LES SCIENCES SOCIALES EN VOIE DE DISPARITION

LES SCIENCES SOCIALES EN VOIE DE DISPARITION

 

Thierry Foucart

 

La motion de l’association française de sociologie votée en assemblée générale le 6 juillet 2023, donnée in extenso ci-dessous, m’a laissé pantois. J’ai cru lire un pamphlet de la France Insoumise ou du Comité vérité et justice pour Adama.

Ce genre de discours montre la médiocrité intellectuelle d’un certain nombre de sociologues qui confondent leurs opinions politiques avec l’analyse sociologique, revendiquent le monopole de la vérité et n’hésitent pas à s’impliquer en tant que scientifiques dans les débats. Ils oublient complètement toutes les règles qui donnent une forme de scientificité aux discours des sciences de l’homme et de la société, exprimées par Max Weber et Émile Durkheim au début du xxe siècle, complétées et approfondies par Raymond Aron qui fustigeait « l’attitude des intellectuels, impitoyables aux défaillances des démocraties, indulgents aux plus grands crimes pourvu qu’ils soient commis au nom des bonnes doctrines », Raymond Boudon et bien d’autres sociologues contemporains. C’est un renouvellement du discours marxiste des années 1970 qui prétendait à la même scientificité que celle des sciences exactes et occultait complètement la réalité soviétique pourtant dévoilée par Khrouchtchev en 1956.

Pour cette association, il n’y a pas de débat : « les discriminations, la précarité, les violences de la part de l’État, et les restrictions de circulation par les contrôles policiers » sont les causes de la violence dans les banlieues. Il semble qu’à leurs yeux, la distribution de drogues à la sortie des établissements scolaires (parfois même à l’intérieur) et au pied des immeubles, les assassinats de trafiquants, les vols et les viols, etc. que supportent les habitants de ces quartiers au quotidien soient négligeables devant des discriminations prétendues et des restrictions de circulation qui n’ont pour but que de combattre les auteurs de ces violences.

Comment des sociologues conscients de leurs responsabilités et interrogeant « le rôle des sciences sociales » peuvent-ils tenir ce discours lui-même factieux et s’étonner des réactions qu’il provoque ?

La transformation de la sociologie en idéologie est en cours. L’aveuglement serait-il plus puissant que l’esprit critique chez les intellectuels dont le rôle est au contraire “d’éclairer le peuple” ?

 

 

Motion de l’AG de l’Association française de sociologie du 6 juillet 2023
sur les révoltes en cours dans les quartiers populaires

 

Le meurtre par la police la semaine dernière de Nahel, un jeune de 17 ans, livreur, racisé, habitant de Nanterre, a suscité un vif émoi dans la population. Cet assassinat a provoqué une colère légitime de la part de celles et ceux qui vivent au quotidien l’expérience croisée de différentes discriminations, la précarité, les violences de la part de l’État, et les restrictions de circulation par les contrôles policiers. Il a aussi donné lieu à une contre-mobilisation réactionnaire : une collecte en ligne a ainsi réuni plus d’un million d’euros pour soutenir le policier qui a tué Nahel ; l’extrême droite en a profité pour organiser des manifestations racistes dans plusieurs villes ; deux syndicats de police sont même allés jusqu’à développer un discours ouvertement factieux.

Ces événements nous amènent forcément à interroger le rôle des sciences sociales, alors que nous sommes réuni·e·s [sic] lors du 10ème congrès de l’Association Française de Sociologie, dont le thème, « intersections, circulations », résonne tout particulièrement avec cette actualité.

Les sciences sociales, et en particulier la sociologie, ont pour vocation d’analyser le monde et de proposer des explications, mais aussi de déconstruire les discours et les pratiques qui naturalisent et justifient les différentes dominations sociales imbriquées (racisme, sexisme et exploitation notamment).

Parce qu’elles jouent ce rôle, les sciences sociales sont particulièrement importantes, et c’est pourquoi il est d’autant plus préoccupant qu’elles soient aujourd’hui attaquées, dans un contexte de montée depuis plusieurs années de la répression et de l’autoritarisme, de la militarisation du maintien de l’ordre (notamment lors des révoltes de 2005 ou plus récemment lors du mouvement des Gilets jaunes, pour ne citer que ces deux exemples).

C’est pourquoi le congrès de l’AFS rassemblé en AG le jeudi 6 juillet 2023 apporte son soutien aux revendications légitimes qui émanent des quartiers populaires : vérité, justice et égalité. L'AFS dénonce les violences policières systémiques, s’indigne contre la « justice » expéditive et la répression judiciaire lourde à laquelle nous assistons depuis plusieurs jours, et s’inquiète de la montée de l’extrême-droite.

 

Association française de soociologie

Motion de l’assemblée générale du 6 juillet 2023

 

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