Transhumanisme : totalitaire ou libéral ?

Transhumanisme : projet totalitaire ou libéral ?

J’ai appris depuis quelques années ce qu’est le transhumanisme, et j’ai essayé de l’aborder avec le regard d’un libéral. Pour ce faire, j’ai beaucoup lu d’auteurs, ce qui m’a permis d’arriver à une définition que je vous livre : C’est un vaste mouvement de tendances idéologiques diverses, poursuivant un projet éthique visant à améliorer l’humanité actuelle sur les plans physiques et intellectuels grâce à la science et aux technologies. Par technologies il faut comprendre les technologies disruptives, telles que l’intelligence artificielle, les biotechnologies, les technologies de l’information, les nano technologies, la techno-médecine etc.… Il y a plusieurs tendances et on peut remarquer que les libéraux sont présents. L’intérêt porté aux technologies disruptives est important. Ce n’est pas une doctrine politique, et à ce jour il n’existe pas d’études sérieuses du point de vue économique. C’est une science encore en gestation et qui semble relever de la science fiction. Les questions éthiques qui en découlent vont rapidement s’imposer dans l’agenda politique à mesure que les progrès technologiques vont devenir commercialisables. Les partis politiques vont devoir prendre position, et l’Etat va devoir légiférer. Il faut aller vite, car les progrès technologiques avancent rapidement. Dans ce cadre, les libéraux doivent s’impliquer pour inspirer des législations futures. Aujourd’hui les informations diffusées le sont par les représentants les plus extrémistes (technophiles exaltés et techno prophètes), ce qui tend à décrédibiliser le sujet et génère des oppositions de la part de conservateurs et d’anticapitalistes. D’autres catégories s’inquiètent des dérives étatiques possibles vers l’eugénisme, le totalitarisme… L’attitude libérale est de s’informer et de définir une position. A titre personnel, je pense qu’il n’est pas souhaitable de se cantonner dans un rejet systématique, parce que je crois que beaucoup de ces améliorations sont intéressantes et souhaitables. Nous pourrions poser un certain nombre de limites assez claires. La médecine traditionnelle a toujours pour objectif de guérir et d’améliorer la santé, tandis que la techno-médecine vise à améliorer l’humain (comme la chirurgie esthétique ou le changement de sexe par gout personnel). Un ensemble de technologies disruptives est regroupé sous l’acronyme de NBIC (N nanotechnologies, B biotechnologies, I technologies de l’information, C science cognitive). Les progrès sont fulgurants, et par exemple le séquençage de l‘ADN que l’on pensait impossible est désormais réalisé, contrairement à ce qu’avait prévu le prix Nobel Jacques Monod. En 2003 le premier séquençage d’un humain a coûté 2,6 milliards de dollars; aujourd’hui le même séquençage coûte 1000 euros. Cela conduit à une médecine personnalisée. De même en pharmacologie, le choix des médicaments exclura ceux que votre séquençage aura déterminé comme inopérants ou incompatibles. Il existe un laboratoire capable, à partir d’un lambeau de peau, de produire le médicament spécifique à votre cancer. De tels progrès ont été possible grâce à la progression fulgurante de la puissance de calcul des ordinateurs et à leur capacité phénoménale de stockage. Cette progression exponentielle suit la loi de Moore, qui commence à être contestée par certains qui considèrent que la progression va ralentir. Parmi les réussites liées aux NBIC on peut citer le cœur artificiel conçu par le professeur Carpentier, le projet de pancréas artificiel, l’œil bionique qui existe déjà, des imprimantes 3 D capables de créer des organes. Un certain Craig Wenter a créé une cellule vivante en 2010. C’est la biologie de synthèse. Des exosquelettes peuvent être greffés et reliés avec des implants sur des handicapés pour leur permettre de retrouver de l’autonomie. Des implants cochléaires permettent à des sourds d’entendre. Des casques équipés d’électrodes permettent de piloter des objets à distance. Elon Musk a lancé la conception d’un « lacet neuronal», qui serait introduit dans le cerveau et qui permettrait de communiquer avec les ordinateurs. Les transhumanistes caressent le rêve de l’immortalité grâce à des remplacements d’organes, ce qui poserait le problème de l’identité. Il existe une frange dure des transhumanistes, en général des hommes puissants, influents et fortunés. Le livre écrit par Raymond Kurzweil « The Singularity is Near » est considéré comme la bible des transhumanistes durs ; il propose de se débarrasser du corps humain en clonant l’esprit dans un autre support. Cette hypothèse reste du domaine du délire. Au sein de Google, où il est ingénieur en chef, il travaille sur un projet consistant à faire fusionner l’intelligence humaine avec les ordinateurs pour créer une intelligence artificielle collective centrale. Un autre techno prophète, l’Ecossais Andy Clark, considère que l’homme est un cyborg de naissance qui a des outils externes (comme des lunettes), mais qui peut avoir des outils internes, comme des implants, des puces, des capteurs … Ces perspectives qui apparaissent inquiétantes ne le sont pas du point de vue de A Clark, car il estime que cette évolution se fera par un glissement progressif et sans douleur. Ainsi, on peut imaginer se faire greffer un œil bionique qui permette de voir à la fois l’infiniment petit comme un microbe ou l’infiniment grand comme les astres. Les adeptes du transhumanisme profitent de l’existence d’actions bénéfiques, telles que les implants pour les sourds, pour considérer que rien ne justifie le blocage de leurs recherches. Seules la philosophie et l’éthique pourront apporter une réponse au positionnement de la limite. Laurent Alexandre considère que, devant le développement de l’intelligence artificielle, l’homme doit augmenter ses capacités intellectuelles pour ne pas être dépassé et remplacé par des robots. Sur cette problématique deux groupes s’opposent. Le premier, qui est dans l’ opposition, est constitué de naturalistes (la nature est violée), de théologiens (l’homme est l’œuvre de Dieu) et de marxistes (technologies réservées aux riches). Le second, qui lui est favorable, est constitué d'humanistes qui considèrent que l’être humain n’est pas seulement naturel, car depuis son apparition, il s’est doté de nombreux outils (depuis la maîtrise du feu jusqu’aux fusées interstellaires). Comme l’a écrit Pic de la Mirandole dans son dialogue entre Dieu et Adam ‘’Dieu a fait le choix de l’homme libre afin que celui-ci se développe et cherche à se dépasser, contrairement aux animaux’’. On pourra opposer à la théorie des marxistes un fait avéré : un nouveau produit acheté cher par les riches dans un premier temps, permet, une fois les coûts de conception amortis, d’être acheté par les plus modestes à un prix moindre. Ce fut le cas des antibiotiques, des montres, des ordinateurs, des smartphones … Les aspects les plus positifs du transhumanisme débouchent sur des opportunités intéressantes, loin de l’alarmisme écologique et de la sinistrose économique ambiante. On peut y trouver l’amorce d’un grand récit motivant pour les populations et des motifs d’investissements économiques. La liberté du choix s’inscrit dans une approche libérale. Toutefois un danger potentiel existe de la part des collectivistes, qui y verraient la possibilité de manipulation génétique afin d’obtenir l’égalité souhaitée, sans avoir à passer par la fiscalité re-distributive. L’intelligence artificielle va promouvoir la mise en place de robots, ce qui certes va détruire des emplois, mais parallèlement d’autres emplois nouveaux vont être induits par cette situation. En réalité il n’y aura pas de destruction, mais bien des transferts d’emplois. Ceci implique de faire bénéficier les personnes d’un droit universel à la formation durant toute leur vie professionnelle, plutôt qu’à bénéficier d’un revenu universel. D’autant plus que l’allongement de la vie, et donc de la vie professionnelle, nécessitera des reconversions multiples. Pour conclure, il s’agit de déterminer où s’arrête l’amélioration de la condition humaine et où commence l’asservissement de l’individu. Une bonne méthode pourrait s’appuyer sur les principes libéraux tels que : les protections du sujet, de l’intimité, des data, de la corporéité (sexualité et sensualité), l’indépendance financière, la liberté morphologique, la liberté d’accès aux soins. Corentin de Salle Transcription de la conférence par nos soins. Visionnez  sur notre chaîne YouTube l'intégralité de la conférence de Corentin de Salle "Le Transhumanisme est-il un projet totalitaire ou libéral ?", donnée lors du Weekend de la liberté 2018. Visionnez sur notre chaîne YouTube l'entretien sur le transhumanisme que Corentin de Salle a accordé à Henri Dumas lors du Weekend de la Liberté 2018.  



1 commentaire(s)

  1. Sans transhumanisme pas de conquête des étoiles !


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